Lutter pour une meilleure reconnaissance de l'endométriose, ça veut dire quoi ?
Vous en avez
probablement entendu parlé : le mois de mars c’est le mois de lutte contre
l’endométriose ! Il y a quelques jours la ministre de la santé a
rencontré des associations et a annoncé un plan de lutte contre l’endométriose.
Ce plan a le mérite de toucher à plusieurs thématiques : la formation des
médecins, le dépistage, l’amélioration du parcours de soin. Cependant cette
annonce est, selon moi, un peu trop mollassonne et oublie aussi quelques
thématiques. Attendons de voir ce que va donner l’application et surtout
demandons toujours plus ! C’est donc le meilleur
moment pour essayer de faire une liste non exhaustive de ce pour quoi on
lutte ? Bah oui au fond on veut quoi ?
Pas de meilleur dépistage sans meilleure formation
Un
dépistage plus fréquent
L’endométriose
connait un énorme retard de diagnostic, entre 7 et 10 ans d’errance médicale en
moyenne pour les malades. Et pour cause, la douleur des femmes est normalisée
et les médecins ne pensent que trop rarement au dépistage.
La ministre de
la santé a annoncé des dépistages entre 11 et 13 ans et 15 et 17 ans sur les
jeunes femmes. C’est bien mais est-ce suffisant ? Rappelons tout d’abord
que l’endométriose peut aussi se déclencher plus tard. Il ne faudrait pas que
cela représente un nouveau frein au diagnostic on les voit venir les « on vous a déjà fait un
examen à 17 ans donc c’est pas ça ». N’oublions
pas aussi toutes les personnes qui ont largement dépassé cet âge. Un dépistage
des plus jeune poussera-t-il les médecins à dépister aussi les femmes adultes
de manière plus systématique lorsqu’elle évoquent leurs symptômes ? J’aimerais
être optimiste mais je vous avoue ne pas l’être vraiment. Voyons ça sur le long
terme.
Plus
de prévention
Depuis
plusieurs années, tourne la campagne avec le slogan "les règles c'est
naturel pas la douleur". Personnellement je suis pas fan du tout de ce
slogan ni de cette campagne mais elle a le mérite d'avoir fait parler de
l'endométriose depuis 2-3 ans. Cependant je trouve que la prévention reste encore trop faible.
Une affiche c'est bien mais je crois que ça ne suffit pas, notamment pour
toucher les plus jeunes.
La ministre
évoque dans ses promesses de plan gouvernemental, le fait que l’endométriose
sera rajoutée dans le programme des services sanitaires des étudiants en santé
qui interviendront dans les collège et lycée. Je ne vais pas m’étendre ici mais
je suis absolument contre ces services sanitaires. La prévention et la
formation c'est un métier ! (en l’occurrence ça fait partie du mien) Elles
nécessitent des connaissances et de l’expérience que n’ont pas les étudiant-e-s
en santé et cette mesure ne m’enchante donc pas.
Je sais
cependant qu'au vu de l'ampleur de la maladie de plus en plus de planning
familiaux s'informent sur les symptômes et en parlent parfois lors de leurs
interventions en milieu scolaire !
Une
place plus conséquente de l’endométriose dans les programmes en fac de santé
Encore
aujourd’hui l‘endométriose est quasiment inexistante des programmes formant nos
futur-e-s médecins. Combien d’entre nous avons appris ce qu’était
l’endométriose à nos soignant-e-s ? Combien un certain nombre de symptômes
fréquents ? Combien ont été confronté à des soignant-e-s qui pensent encore que
l’endométriose est un mythe ? j'ai
personnellement appris à mon médecin de famille ce qu'était l'endométriose
Le 8 mars dernier
Agnès Buzyn a annoncé un renforcement de la question de l’endométriose dans la
formation. J’espère qu’elle sera évoquée de manière juste et en laissant de
côté tous les mythes auxquels pas mal de médecins croient encore. Non,
enlever l'utérus ne règle pas le problème. Non, nous n'avons pas mal uniquement
pendant nos règles. Oui, les symptômes urinaires et digestifs peuvent
être des symptômes de l'endométriose.
En somme nous
voulons une meilleurs connaissances de professionnel-le-s de santé et PAS QUE DES GYNÉCOS !!!! Les
généralistes, des urologues, des gastro gastroentérologues, les radiologues
sont tout aussi concernés !
La mise en place de centres spécialisés et un parcours de santé plus fluide
Bon personne ici ne me contredira : c’est une urgence.
Les spécialistes sont peu nombreux. Les centres qui prennent en charge de
manière complète les personnes qui ont l’endométriose sont rares. A ma
connaissance tout ce beau monde est totalement débordé par le nombre de
patient-e-s. Rien d’étonnant, dans ma ville il n’y a qu’un seul spécialiste de
l’endo et à chaque fois que je vais chez lui, je me retrouve dans la salle
d’attente avec des patientes qui ont fait des centaines de kilomètres pour le
voir. En tant que malade je crains de me retrouver un jour à devoir me rabattre
vers un chirurgien moins spécialisé à cause des délais.
Je croise les doigts, j'ose déjà espérer que cette plus grosse
médiatisation de l'endométriose poussera plus de médecins à se spécialiser Allez les gars et les meufs ! On vous attends !!!
Une lutte contre les maltraitances médicales
Pour
une meilleure prise en compte de notre douleur !
Bon vous allez
me dire ça va avec les points précédents. Effectivement la plupart de ces
maltraitances ont lieu durant l'errance médicale et sont dues à la
méconnaissance de la maladie. Je trouve cependant important de réaffirmer notre
droit en tant que patient au consentement et au
respect. La parole a propos des maltraitances médicales se libère de
plus en plus au fil des années. Malgré un certain nombre de médecins qui se
sont insurgés de la violence de leur milieu envers notamment les femmes (Je
vous renvoie entre autres à Martin Winckler, ses articles de blog et ses ouvrages),
les pouvoirs publics semblent ne pas prendre les faits reportés au sérieux. Les
patient-e-s avec l’endométriose, de par leur longue errance médicales sont
confronté-e-s bien trop souvent aux violences médicales. Nous souhaitons donc
la fin de l’impunité pour des soignant-e-s maltraitant-e-s (et ça inclut ceux qui taisent la maladie volontairement,
encore récemment une connaissance m'a raconté une histoire similaire), une
meilleure écoute de la douleur des femmes.
La fin d'une approche psychologisante de l'endométriose
Encore
aujourd’hui des théories plus que douteuses sur les femmes atteintes
d'endométrioses sont relayées par des soignant-e-s. On a notamment celle selon
lesquels les femmes qui ont l’endométriose seraient toutes des victimes de
viol. De même que celle qui dit que l’endométriose vient d’un rejet de notre
féminité va falloir changer de registre les
gars parce que ça fait 287 maladies pour lesquelles on nous dit ça,
renouvelez-vous. Pas besoin de
préciser que ces théories sont totalement infondées et contribuent à rejeter la
culpabilise sur les femmes. Elles détournent bien souvent le sujet et mettent
là encore le traitement de la douleur de côté.
De la thune pour la recherche !!!!
Bon ça va être un peu le point hasardeux : non je ne sais pas combien d'argent est consacrée à la lutte contre l'endométriose en France. De toute façon tu pourrais me dire un chiffre, je ne saurais pas te dire c'est c'est beaucoup ou peu. Mais bon sang ! Ça
fait deux siècles qu'on connait la maladie, ça touche des millions de personnes
et j'ai l'impression qu'on en est encore à quémander 3 francs six sous. C'est dur à dire car je suis
pas dans la recherche mais vous aussi vous avez l'impression de voir passer
uniquement des résultats de recherche d'autres pays ? Bien sûr il y a des
progrès : on élimine de plus en plus de causes de la maladie, on isole aussi
des facteurs à risques. Il y a des soignants qui innovent pour éliminer les
lésions lors des opérations avec de nouvelles techniques. Oui bien sûr. Mais on
ne sait toujours pas d'où vient l'endométriose, ni comment la soigner !
Aujourd'hui on ne sait que limiter les dégâts.
Bien sûr il y a
encore des tas d'éléments que l'on pourrait rajouter à cette liste : reconnaissance de l'endométriose comme une Affliction
Longue Durée, faciliter la reconnaissance du statut de travailleur handicapé
et tout ce qui touche plus globalement à la vie quotidienne en tant que malade
chronique.
Parhélie
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