Avant mes 24 ans mon endométriose était asymptomatique...enfin c'est ce qu'on m'a dit.
Quand on a m’a diagnostiqué l’endométriose, mon chirurgien
m’a dit : Vous allez voir, vous allez sans cesse vous rappeler des
moments de votre vie où l’endométriose faisait timidement son
apparition et vous allez pouvoir mettre un mot dessus, revoir les
événements d’un autre œil. Je repense si souvent à cette phrase et pour
cause …
Je repense à mes règles devenus douloureuses vers 15-16 ans.
Si douloureuses que je me gave de médicaments trouvés dans la pharmacie
familiale
Puis je repense aux 9 années
suivantes durant lesquelles je vais régulièrement chez le médecin pour demander une ordonnance
en parlant du fait que je suis tordue en deux. Jamais on ne me posera plus de
questions sur ces douleurs.
Je repense à ce jour de mon année de
première où j’appelle ma mère en pleurs vers 16 heures. La suppliant de me laisser
sécher les deux heures d’histoire géo qui me restent et de rentrer. J’ai oublié
de prendre mes anti-inflammatoires, c’est le premier jour de mes règles et je
suis à deux doigts du malaise au milieu de la cour. Tout tourne autour de moi,
j’ai envie de vomir, je tiens à peine debout.
Je repense à ces quatre fois où on a
soupçonné que j’avais l’appendicite car j’avais une douleur dans le bas ventre.
Douleur que je ressens clairement aujourd’hui durant certaines crises d’endo. On
m’a renvoyé chez moi à chaque fois. C’est le stress parait-il. Il faut pas
s’affoler pour rien.
Je repense à cette gynéco, vue à 19
ans, à qui je parle de mes règles douloureuses et avec qui j’évoque des
douleurs après les rapports. Elle me prescrit une nouvelle pilule : ça devrait s’arranger
Mes douleurs disparaissent pendant un an et demi. En parallèle je prends aussi un antiépileptique car je suis migraineuse. J'apprendrais plus tard qu'il est utilisé parfois pour soulager les douleurs liée à l'endo.
Je repense à mes 21-22 ans, années
durant lesquelles j’ai ces douleurs régulières et fulgurantes au ventre qui
m’empêchent de dormir et que je liais au stress.
Je repense à ce soir où je hurlais
de douleur pendant mes règles, sans pouvoir me lever. Je vomis, je tremble,
souffre comme jamais. Mon ex copain, affolé, cherche sur Google mes symptômes,
trouve l’endométriose. Je lui réponds : Mais non ! Les femmes qui ont
l’endométriose souffrent vraiment
Je repense à cette année de mes 23
ans où j’ai lutté contre les chutes de tension et les bouffées de chaleur en
permanence. Rien sur les analyses. Ma sœur me dit : Tu es sure que tu
t’écoutes pas trop ?
Certes rien ne me prouve que c’était lié
à l’endo, je peux cependant pas m’empêcher d’y voir un appel au secours de mon
corps
Je repense à cette période où de manière systématique, 2 jours par
mois, je suis pliée en deux. On me rit au nez quand je dis que ça tombe toujours au milieu de mon cycle. Tu es stressée par
tes études, c'est tout !
Il parait qu’avant 24 ans mon
endométriose était asymptomatique. Avant ça j’étais stressée, je m’écoutais
trop, j’étais douillette, je somatisais mais je n’étais certainement pas malade,
voyez-vous.
Aujourd’hui en France une femme met en
moyenne 7 ans pour se faire diagnostiquer une endométriose. J’ai eu l’habitude
de dire que mon errance médicale a duré moins d'un an (à partir du moment où je me suis
mise à avoir mal 24h/24 7j/7) On m'a souvent dit que ça pouvait apparaître d'un seul coup, à mon âge mais est-ce vrai dans mon cas ? N’ai-je pas intériorisé
si fort que tout ça était normal ? N’ai-je pas banalisé mes douleurs ?
Le fait que l’on m’ait répété tellement de fois que j’étais douillette et
stressée n’a-t-il pas eu une influence sur ma manière de percevoir mes
symptômes ? Comment, en pleine crise d’endo et connaissant tous les
symptômes de la maladie, j’ai pu dire que contrairement à moi les femmes qui
ont l’endométriose souffrent vraiment ? Les neuf années que je décris ici ne faisaient-elles pas partie de cette errance ? Après tout, je n'ai pas identifié le problème parce qu'on m'a dit de multiples fois qu'il n'en était pas un. Est-ce que dans une
société où le cycle menstruel n’est pas un tabou, les douleurs des femmes ne
sont pas niées et où les soignant-e-s sont formé-e-s, je me serais inquiétée de ces
douleurs dès mes 15 ans ?
Bouillottement votre,
Parhelie
Commentaires
Enregistrer un commentaire